Au départ, le parcours de Luyeye ressemble à celui de nombreux jeunes en quête d’une vie meilleure. Encore mineur, il fait environ 8500 km pour atteindre les frontières de l’Europe. En Suisse, une famille d’accueil lui donne les bases pour commencer une nouvelle vie, mais la traversée de l’Afrique a laissé des marques sur son corps.
Aujourd’hui, Luyeye a 38 ans. Il est arrivé en Suisse alors qu’il était mineur, il y a plus de 21 ans. Ce fut un départ précipité pour le Congolais de naissance. « Les policiers ont battu et abusé de ma mère. Ma grand-mère m’a donné l’argent de la vente de la plantation de café, je suis parti en direction de la Centrafrique. » Son trajet est malheureusement très banal, similaire à celui de nombreux jeunes qui débarquent sur une route migratoire comportant de nombreux dangers et parsemée d’embûches. En chemin, il y a les passages à tabac et les mauvaises rencontres dans les squats qu’il fréquente. Il traverse de nombreux pays et arrive en Italie à 16 ans. « Quand je suis enfin arrivé en Suisse, je me suis dit : ‘Je suis grand !’ » rigole-t-il. Il suit le chemin habituel du migrant en passant par les centres pour réfugiés. Tout d’abord celui de Vallorbe, puis les nombreux autres. Ensuite, il est hébergé par une famille d’accueil à Évilard.
Dans les montagnes, le jeune garçon apprécie les promenades avec les chiens de la famille. « Des golden retrievers, précise-t-il. Dans la forêt, je marche à mon rythme, je suis au calme. »
L’intégration chez Prélude
Luyeye a travaillé dans le bâtiment, notamment dans la pose de carrelage. Mais cette marche à travers l’Afrique lui a laissé des séquelles physiques. Une hernie discale, d’abord, suivie de problèmes d’arthrose au niveau des jambes. L’homme a également un déficit de la vue à la suite d’un coup involontaire donné par un camarade… en Suisse. Quatre opérations sont nécessaires pour retrouver une certaine acuité visuelle. « J’ai fait 8500 kilomètres à pied, j’ai affronté de nombreuses épreuves et maintenant, ma santé m’empêche de travailler comme j’aimerais. »
Au bénéfice de l’AI, il a cherché un emploi dans des institutions adaptées, se heurtant bien souvent à des refus en raison de sa santé. En 2020, il découvre Prélude SA et adopte immédiatement cette place de travail. « Quand je sors de chez moi et que j’arrive ici, je suis parfaitement à l’aise. Je m’occupe notamment au secteur logistique. » Luyeye est un maniaque du ménage. Lorsqu’il commence un mandat pour l’entreprise, il met tout en œuvre pour que cela soit aussi propre que chez lui.
Une boussole
Dans son parcours, il a eu quelques problèmes avec l’alcool. Toutefois, il s’est ressaisi afin de devenir exemplaire. « J’ai donné mon cœur à ma famille d’accueil », exprime-t-il. D’ailleurs, au cours de l’entretien, Luyeye n’a cessé de rendre hommage à cette famille, qu’il ne veut pas décevoir, car « elle m’a donné des valeurs ». Il a aussi beaucoup honoré le souvenir de sa mère biologique. « Elle a été comme une boussole, c’est à elle que je dois de savoir écouter. Je ne l’ai jamais revue. Je regrette de ne pas pouvoir lui montrer comme je suis fort grâce à elle. »
L’intégration de Luyeye chez Prélude lui a permis de trouver une certaine stabilité qui passe notamment par sa fierté d’avoir un travail. « J’ai décroché cette place chez Prélude, je vais tout faire pour m’en montrer digne et y rester », conclut-il.